
Alors que je fais le pied de grue en attendant un autobus qui 5 fois sur 5 est en retard ou carrément bondé, j'ai le temps d'observer mes nombreux concitoyens de banlieue. Parmi eux, un type qui doit avoir une 40aine d'années, mais qui à cause d'un retard psychologique, en parait à peine 20. Oreilles décollées, regard absent et lèvre inférieure molasse qui ajoute au personnage une difficulté à se faire comprendre. Tous les jours, il tente tant mal que bien de se faire des amis. Sa technique? Il parle à quelqu'un, un homme de préférence et si la personne ciblée lui répond, il s'agrippe à elle comme si c'était devenu de grands amis. Donc quotidiennement, il va s'asseoir à côté de sa proie et lui débite un flot de paroles incompréhensibles.
J'ai vu plusieurs personnes exaspérées changer de place dans l'autobus afin de se libérer du mauvais sort. Avec un peu de pitié, je regardais les échecs du chasseur d'amis. J'évitais toutefois son regard éteint, afin de ne pas lui lancer une invitation sans le vouloir.
Un bon matin, sans proie à grignoter (est-ce qu'elles ont décidé finalement de prendre leur auto?), le chasseur s'est arrêté devant moi...
— Wesque zu voueux bouin moin ammmmmi?
Ça y est, le mauvais sort était lancé. Du vaudou? Je l'ignore... Ne réponds pas, ne réponds pas...
— Oui, répondis-je sans trop de conviction. Il paraît que lorsqu'on ne comprend pas ce qu'une personne dit, 1 fois sur 3, « oui » est une réponse acceptable.... Pas cette fois.
Donc, depuis ce temps... à tous les matins, le chasseur tourne autour de sa proie.
Un matin où l'autobus était vide, (J'essaie encore de comprendre ce qui s'est passé ce matin-là...) je me suis assis tout au fond de l'autobus. Enfin, je pouvais respirer à fond sans que mes côtes chatouillent l'aisselle mal entretenue d'un voisin de banc. Je sors un livre de mon sac afin que le voyage paraisse moins long. Je relève la tête et je vois le chasseur se diriger vers moi. Évidemment, il vient s'asseoir sur le banc limitrophe. Je tente de l'ignorer et plonge mon regard dans mon bouquin.
— Wesque zu voueux bouin moin ammmmmi?
Encore l'incantation maudite.... Je me retiens et ne réponds rien. Il me tapote l'épaule afin d'attirer mon attention. Je résiste. Il recommence. Je lève la tête.
— Excuse-moi, mais je n'ai pas le goût de jaser ce matin.
Sans attendre une réponse, je replonge la tête sur ma lecture qui actuellement ne me sert qu'à éviter mon chasseur. Il recommence son manège et me touche l'épaule.
— Wesque zu vu mouin ventre?
Je suis curieux, je réussis enfin à comprendre un mot. Pourquoi me parle-t-il de ventre? Je relève la tête et avec horreur le voit relever son chandail et se taponner le ventre en déboulant un flot de paroles incompréhensibles..
Ma patience a des limites.... mais on ne se taponne pas le ventre en me regardant. Depuis ce jour, je me suis coupé les cheveux et j'enfile mes lunettes la majorité du temps. Il ne m'a pas encore reconnu... Je compte les jours...
C'est drole, il y a un personnage semblable qui se promène dans mon secteur !
RépondreEffacerComble de malheur, il est venu me jaser une fois. J'ai cru comprendre qu'il m'avait demander l'âge de Gabriel. Ensuite, j'ai plus rien compris et je me suis poussé en l'ignorant un peu ;-)
Je le rencontre à l'occasion en voiture (il se promène souvent à pied) et il m'envoit la main chaque fois comme si on se connaissait depuis longtemps. Même chose quand je suis avec l'auto de Chantal...
Quel étrange personnage... ;-)
nannnnn mounnn gtomp ammmmi?
RépondreEffacerJe lui ai payé le taxi jusque dans ton coin.. Ça m'a coûté cher.. mais c'est tellement plus agréable de lire mes bouquins dans le bus.. mdr!! hahah!
RépondreEffacerAndré-Philippe Gagnon sort du corps de "Monsieur L'Adulte" hahah!